Skip links

Notre rapport au temps, une histoire de fous

Test

  •  Vous avez regardé la longueur de cet article avant de vous lancer dans sa lecture
  • Vous faites deux ou trois choses en même temps que vous êtes en train de lire
  • Vous cherchez un résumé pour éviter de tout lire
  • Vous n’avez pas lu cette ligne qui parle d’un gros lapin rose en train de se taper une ligne de coke avec Rihanna
  • Vous avez déjà reçu plusieurs notifications depuis le début de cette lecture

Si vous cochez une ou plusieurs de ces cases, vous feriez bien de continuer la lecture de cet article. Pour les autres, merci de votre curiosité, ça fait plaisir d’avoir un lectorat sain et équilibré.

L’être humain a atteint son pic de saturation

L’Homme occidental moderne dégueule littéralement d’une overdose de tout, d’une addiction à l’activité. Il est en train d’éclater d’une indigestion à l’information, d’outils qui accaparent son attention, de distractions , d’activités en tous genres, de travail. On marche sur la tête, c’est une histoire de fous.

L’être humain a atteint son pic de saturation. Il lui reste par contre une marge incroyable de progression avant d’atteindre son pic de connerie. Car à force de remplir le temps de choses à faire, de perte de concentration, de captation de la moindre seconde d’attention par les systèmes commerciaux digitaux (notifications, suggestions de lecture automatiques, publicités ciblées imposées, …), moins il reste de temps à l’Homme occidental moderne pour discerner, prendre du recul, réfléchir et donc, tout simplement, exercer sa faculté d’être intelligent. CQFD, on est tous en train de devenir cons. On est déjà fous, car on joue le jeu, on laisse faire. On est déjà malades du vide de sens de cette activité qui n’en a aucun, qui ne nous mène nulle part, qui ne crée pas de lien, qui ne nous élève pas, qui nous laisse exsangue à l’arrivée du week-end et des vacances, vacances où notre corps s’écroule en décompressant de ne plus pouvoir tenir le rythme.

Un bête problème de physique

Comment en est-on arrivé là ? Cela peut s’illustrer par un bête problème de physique : celui du débit. Un débit s’exprime en multipliant une surface par une vitesse. Notre activité peut se comparer à un débit : nous avons une certaine surface d’action et une vitesse d’action pour jouer sur notre activité. Gagner du temps se ramène dans l’équation à augmenter la vitesse. Appelons surface notre aire de travail, c’est à dire notre capacité de travail, et surface informationnnelle, notre capacité cérébrale à avaler de l’information. Ces surfaces par individu étant constantes – si, si – le seul moyen d’augmenter notre flux nous paraît être d’augmenter la vitesse en gagnant du temps, en faisant les choses plus vite, en en faisant plus mais moins bien, etc … sauf que cette bête équation physique ne fonctionne qu’en théorie. Parce que dans le monde réel, quand on augmente la vitesse de passage – ou, ce qui revient au même, quand on augmente le nombre de choses qu’on veut faire passer en même temps, il se passe un truc que nous connaissons tous quand on se retrouve pris comme des ânes dans les bouchons sur le périph : il y a des frottements et ça coince. Ça s’appelle la mécanique des fluides…

Il faut arrêter de croire que les outils de productivité vont nous aider, ils ne font que nous enfoncer un peu plus chaque jour : plus il y a de la place, plus ça se remplit. Regardez les bouchons dont nos villes sont malades. On va réclamer des contournements, des voies supplémentaires en pensant que ça va fluidifier le trafic. Après une brève accalmie, c’est toujours exactement l’inverse qui se produit : plus il y a de la place, plus il y a de trafic. Ce qui finit invariablement par encore plus de bouchons.

Comment résister à la pression extérieure, à la pression logistique de la vie quotidienne, fiscale, financière, morale, sociale, à la pression hiérarchique, à la pression du quantitatif au détriment de la qualité de vie, de la qualité de travail, de la qualité d’être ?

Tao et présence

 

Peut-être en se posant quelques questions de traverse du style :

  • Fait-on vraiment moins de choses quand on prend le temps ?
  • Faut-il ralentir ou créer du vide ?
  • Ralentir quoi et augmenter quoi ?

 

Le mal est tellement profond que je ne crois pas à la seule gestion de l’agenda et des gros cailloux pour s’en sortir. C’est un profond travail personnel de chercheur en joie qui s’impose à moi, encore une fois.

Le Tao nous enseigne que la vie est un équilibre dynamique entre le yin et le yang, l’obscurité et la lumière, le creux et le plein. Comme il ne peut y avoir de lumIère sans obscurité, il ne peut y avoir de plein sans creux. Si nous ne faisons pas la place pour plus d’activités et d’informations, où allons-nous les mettre ? Il faut d’abord faire le creux, pour pouvoir le remplir.

C’est comme si le vide faisait peur. Se retrouver seul chez soi à ne rien faire – vraiment rien faire, pas regarder la télé ou jouer sur sa console – n’est pas pensable, n’est pas acceptable socialement. C’est un échec, un tabou.

Le chemin est à l’intérieur et dans la présence. La présence à l’instant, au présent, nécessite que les bruits de la vie moderne s’arrêtent. C’est comme écouter l’Univers, il faut supprimer tous les bruits parasites. C’est comme regarder les étoiles, il faut supprimer toutes les lumières parasites. C’est à ce moment-là que la beauté nous apparaît, fragile, fugitive. Dans ces moments-là, si rares, on peut se sentir à nouveau humain. On n’a pas forcément une direction où aller, une signification à notre existence, mais on se sent vivant. Si ralentir, prendre le temps peut nous permettre ça, je pense que ça vaut le coup d’essayer. J’allais dire j’y cours, mais je vais y aller tranquillement, en marchant, et observer ce que la Vie a à m’apprendre sur le chemin.

Je vous souhaite de vivre une lente et belle rentrée.

Laisser un commentaire

This website uses cookies to improve your web experience.