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Lumière crue sur le monde du travail

Comment demander l’engagement et l’implication des salariés quand on ne les paye pas ? Qu’espérer lorsque c’est la mauvaise foi, l’incompétence et l’irresponsabilité qui font loi ?
Chez F-Cube, nous accompagnons la transformation des entreprises. Nous avons la conviction que c’est plus de bien-être et d’épanouissement des personnes que se développeront l’autonomie et l’engagement, et donc la performance. Alors, lorsqu’une histoire pareille nous est racontée, forcément on est dégoûtés. Elle est pourtant absolument vraie.

Une histoire pas banale …

Cette personne – appelons-la B. – travaille pour une grande boîte d’intérim. B. vient d’effecteur ses premières missions et attend la paye de son premier mois. Dans l’intérim, elles sont virées le 12 du mois. Le 12 arrive, et rien sur le compte. Elle attend le 13, au cas où, et appelle son agence, où on lui dit ne pas savoir car les payes sont gérées au niveau de la région, et on lui donne un numéro. Elle appelle. On lui dit que le virement a bien été fait. Ah, pourtant je n’ai rien reçu. Aucune réaction. Peut-être vous êtes-vous trompés de numéro de compte ?, suggère B. Ça m’étonnerait, lui répond son interlocuteur, mais il veut bien vérifier avec elle. Il lit, chiffre après chiffre, elle valide. Tous les premiers numéros sont identiques, seuls les 5 derniers diffèrent. Ce n’est pas le bon RIB. Qu’à cela ne tienne. Confiant et bonhomme, l’homme du sérail explique qu’il n’y a qu’à attendre que le virement soit refusé par la banque, puisque le RIB est faux. Et si le compte existait, que se passerait-il, ose demander B. ? Réponse, tout aussi sûre et certaine : c’est extrêmement rare, mais même si ça arrivait, la banque ferait le rapprochement entre le nom du titulaire et le numéro de compte, ils verraient que ça ne colle pas, et retourneraient le virement. Il n’y a donc qu’à attendre sereinement. Limpide.

15 jours passent. Le salaire de B. n’est toujours pas viré. Inquiet, notre personnage central interroge sa banque… qui lui explique qu’elle ne peut rien faire et renvoie vers l’agence d’intérim : ils n’ont pas saisi le bon RIB, l’erreur vient donc d’eux. Sauf qu’une banque est censée vérifier si le nom et le numéro de compte correspondent lors d’un virement, n’est-ce pas ? Donc, la banque porterait également une part de responsabilité, non ? En fait, les banques ne vérifient jamais. À l’agence d’intérim, les mêmes réponses se répètent, entêtées : Désolé, on ne peut rien faire, désolé. Le salaire de B. n’est toujours pas payé.

Un salaire non payé ? Pas grave. 

S’ensuit une série ubuesque d’échanges téléphoniques avec le service paie de l’agence d’intérim, chaque fois avec un interlocuteur différent (sinon ce serait trop simple). Tout y passe, de l’irresponsabilité à la condescendance : « on ne peut rien faire », « on ne peut pas faire deux fois le même virement », « c’est à vous de voir avec votre banque », « nous ne pouvons pas intervenir auprès de votre banque », « je n’ai pas le pouvoir de faire quelque chose, il faut en référer à mon responsable », jusqu’aux plaintes dudit service à l’agence de rattachement de B. sur le fait qu’elle serait véhémente, voire agressive dans ses réclamations. Puis, subitement, les offres d’emploi sur son application cessent.

Plusieurs autres semaines se passent, au cours desquelles B. envisage les recours possibles, se renseigne. Plusieurs choses émergent. D’abord la responsabilité de l’agence d’intérim qui, en tant qu’employeur, ne lui a pas payé son salaire. L’employeur devrait dissocier le paiement du salaire du traitement de l’erreur de virement, afin de récupérer l’argent qu’il a viré – par sa faute – sur un mauvais compte. On serait tenté d’ajouter qu’elle pourrait ensuite tenter de régler les erreurs d’incompétence et les manques de rigueur du collaborateur qui a fait la boulette. Ensuite, la voie judiciaire. Le tribunal d’instance semble être la seule voie pour réclamer ce qui vous est dû. B. hésite à se lancer dans une telle procédure, longue et incertaine.

Obligé de se battre pour ce qui est un dû

Presque deux mois se passent. Lors d’un rendez-vous avec sa banque pour un tout autre sujet, B. explique que le problème n’est toujours pas réglé. Son interlocuteur, très surpris, lui dit alors : « Ah bon ? Mais nous avons fait le nécessaire. Nous avons récupéré le virement sur le mauvais compte et nous l’avons renvoyé à votre agence d’intérim ».

C’est en appelant le lendemain le service paie de l’agence d’intérim qu’on lui confirmera qu’effectivement, ils avaient vu passer un mail avec le virement. Mais absolument personne n’avait bougé le petit doigt, ni informé B. ! Il faudra attendre une autre semaine pour voir enfin le salaire viré.

Ce cas, aussi rocambolesque puisse-t-il sembler, n’est pas isolé. Que faire ? Comment et où agir pour changer ça ? Quelle est l’ampleur d’une telle ambition ? Il y a bien sûr des gens biens et des personnes correctes qui font correctement leur boulot, des managers et des dirigeants réellement responsables, mais parfois, devant l’immensité de la montagne à gravir, les bras m’en tombent. Avant de repartir, il m’a semblé bon de partager l’histoire de B., ne serait-ce que pour dire les non-dits et rester éveillé.

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